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L’ÉQUILIBRE COMPÉTITIF DE LA MLB À UN POINT DE RUPTURE

  • Publié le
  • Par Carl Lemelin
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L’ÉQUILIBRE COMPÉTITIF DE LA MLB À UN POINT DE RUPTURE

La signature historique de la supervedette Shohei Ohtani par les Dodgers a mis en évidence un problème d'équilibre compétitif que la MLB n'a pas encore correctement résolu.

 

Cette intersaison, plus que jamais auparavant, a montré à quel point la taxe d’équilibre compétitif actuelle de la MLB (« Competitive Balance Tax » ou « CBT » en anglais, aussi appelée taxe de luxe) est complètement inefficace. Nous savions déjà que les propriétaires des équipes riches ne se souciaient pas de payer une taxe de luxe, même une importante somme, si cela signifiait aligner une équipe capable de remporter la Série mondiale, mais les deux retentissantes signatures d’agents libres par les Dodgers le mois passé ont fait une risée la CBT et ce qu'elle représente !

Avant d'entrer dans les détails de la CBT et d’aborder les corrections nécessaires, revenons à ses origines, le pourquoi et le comment elle a été créée.

 

PROTÉGER LES FRANCHISES À PETIT MARCHÉ

Les sports majeurs nord-américains prospèrent grâce à une couverture transcontinentale. C'est ce qui les positionne légitimement comme « majeurs ». La NFL, la NBA, la LNH et la MLB comptent maintenant toutes 30 franchises ou plus.

Les grands marchés comme New York, Chicago, Los Angeles et quelques autres ne représentent qu'une fraction de ces ligues. Pourtant, laissés à eux-mêmes, les propriétaires de ces équipes des grandes zones métropolitaines dépenseraient des sommes apparemment illimitées pour les salaires de leurs joueurs. Ils dirigent leur franchise comme un objet de collection prestigieux dont ils veulent accroître la valeur.

En revanche, les propriétaires de marchés plus petits doivent gérer leur franchise comme n'importe quelle autre entreprise. Les opérations doivent générer un profit. Pour eux, il y a peu voire aucune tolérance pour un déficit.

Ce sont des différences philosophiques acceptables dans les approches commerciales du monde réel. Mais dans le domaine du sport professionnel, la dichotomie, si elle n'est pas règlementée, mène droit au désastre.

C'est pourquoi, à la suite de la grève des joueurs de 1994 (que les fans des Expos de Montréal accusent d'avoir entraîné le déménagement de leur équipe à Washington) la MLB a insisté sur la mise en place d'un mécanisme destiné à restreindre les dépenses des propriétaires en salaires de joueurs. La première version de la CBT est entrée en vigueur en 1997.

L'Association des joueurs avait insisté sur le fait qu'elle n'accepterait jamais un plafond salarial strict - comme l'avaient déjà adopté les trois autres ligues majeures. Ainsi, la MLB a choisi de confier aux propriétaires la responsabilité de réguler les salaires des joueurs en taxant les plus « riches » d'entre eux au-delà d'un certain seuil de dépenses salariales, redistribuant la richesse aux franchises plus « pauvres ».

En principe, je préconise cette méthode pour assurer un équilibre compétitif, car le sport est du divertissement, et les joueurs SONT le spectacle. Ils devraient pouvoir gagner autant qu’un propriétaire est prêt à payer pour leurs services.

Cependant, comme la viabilité des petits marchés dépend d'un certain espoir de rivaliser avec les gros joueurs chez leurs partisans, les propriétaires ont la responsabilité de réguler les dépenses salariales entre eux.

La CBT a depuis évolué vers sa structure actuelle, en place depuis la saison 2002.

 

CBT 101

La taxe de luxe de la MLB stipule que les équipes qui dépensent le plus doivent payer une taxe si elles dépassent un seuil prédéterminé pour les salaires des joueurs. Les fonds provenant de ces taxes doivent être redistribués, selon les paramètres définis dans la CBA (« Collective Bargaining Agreement » ou convention collective de travail), aux équipes qui dépensent le moins pour leur masse salariale. Le but est de décourager les dépenses excessives en haut de la hiérarchie et d’encourager les équipes à petit marché à dépenser davantage.

De plus, les équipes qui dépassent le seuil pendant plusieurs années consécutives sont taxées à des taux plus élevés : 30 % de l'excédent la première année, 40 % la deuxième année consécutive, et 50 % pour une troisième année consécutive de dépassement. Pour encourager davantage les gros dépensiers à réduire leurs masses salariales annuelles, si une équipe taxée passe sous le seuil l'année suivante, le taux croissant est réinitialisé à 30 %.

La MLB a préétabli le nouveau seuil de dépenses aux fins de la CBT avec la ratification de la dernière CBA (2022-2026). Le montant fixé pour 2024 est de 237 millions de dollars. À titre de référence, le seuil de la CBT pour 2023 était de 233 millions de dollars, et 230 millions de dollars pour 2022.

L'année dernière a vu un record de 209 millions de dollars de fonds de taxe versés par huit franchises fautives. Avec une telle somme à distribuer aux moins fortunés, on pourrait pardonner à ceux qui ne comprennent pas pourquoi il existe encore un fossé aussi profond entre les bien nantis et les enfants pauvres dans le baseball.

 

LES DODGERS : ÉTUDE DE CAS SUR L’INEPTITUDE DE LA CBT

Si le but de la CBT est de limiter les dépenses excessives et de réduire l'écart salarial à travers les Ligues majeures, j'ai une question très déconcertante pour le Commissaire : après avoir dépensé plus d'UN MILLIARD de dollars pour deux superstars japonaises (le joueur polyvalent MVP Shohei Ohtani et le lanceur partant Yoshinobu Yamamoto), comment se fait-il que la facture estimée de la CBT des Dodgers pour 2024 soit d’un montant dérisoire de 761 524 dollars (selon Spotrac.com) ?

En creusant un peu, la première chose qu’on remarque est que, bien que la structure de base de la CBT telle qu'elle est présentée publiquement semble être un moyen viable d'amenuiser l’écart des actifs, certaines clauses peu connues de la CBA l'ont rendu très inefficace en pratique.

Ce que vous devez savoir, c'est qu'à des fins comptables, la CBA fait la distinction entre le salaire réel des joueurs, soit leur AAV (« Average Annual Value » ou valeur annuelle moyenne), et leur salaire assujetti à la taxe de luxe.

Quelle est la différence ?

La CBA autorise le report du salaire d'un joueur, s'il est convenu par les deux parties. Par exemple, l'AAV de Shohei est de 70 millions de dollars (700 millions de dollars répartis sur 10 ans), mais il a accepté d'être payé seulement 2 millions de dollars par an pendant la durée du contrat, et le reste de l'argent dû (680 millions de dollars) sera versé au cours des 10 années suivantes, ce qui signifie qu'il sera payé par les Dodgers jusqu'en 2043.

Des gymnastiques comptables ont déterminé que, selon de nombreux facteurs économiques, si le contrat devait être payé normalement, il aurait une valeur d'AAV de 46 millions de dollars. Ce résultat magique devient ainsi le salaire assujetti à la taxe de luxe d'Ohtani.

Certains amateurs de baseball occasionnels ne savent peut-être pas que les Dodgers ont également utilisé cette faille de la CBA lorsqu'ils ont signé Mookie Betts et Freddie Freeman à de faramineux contrats au cours des dernières années. Eh oui, deux autres candidats au MVP perpétuels dont l’AAV est réduit considérablement pour fins de calcul de la CBT, afin qu'ils puissent tous s'intégrer dans une même formation super puissante.

 

ALORS, QUELLE EST LA SOLUTION ?

Il est évident que lorsque le conseil d'administration de la MLB s'est réuni en 1997 pour adopter la CBT, il était pleinement conscient de la nécessité de sauver ses franchises de petits marchés en adoptant un système avec une forme de redistribution des richesses.

Cependant, les Dodgers sont la preuve vivante que, sous sa constitution actuelle, la CBT échoue misérablement à atteindre son objectif. Je crois que le cœur du problème réside dans le manque de vision à long terme de la part des propriétaires des grands marchés.

Les propriétaires sont naturellement de fervents capitalistes, alors ils ont accepté à contrecœur un principe apparemment socialiste.

Un autre mot qui décrit les propriétaires de la MLB est « ultra-compétitifs ». C'est pourquoi ils ont insisté pour inclure cette clause contre-productive (celle permettant le report des paiements et un ajustement de la masse salariale assujettie à la taxe de luxe) lors des négociations de la CBA.

« Nous accepterons d'être taxés pour dépenses excessives, mais en retour, donnez-nous une clause de sortie au cas où nous verrions une opportunité d’assembler une super puissance, » voilà comment je l’interprète. Les propriétaires des grands marchés sont comme des enfants qui ne voient que ce qui est juste devant eux : GAGNER MAINTENANT !

Outre la faille des paiements différés, l'autre fait largement méconnu concernant la CBT est que la redistribution de l'argent de la taxe n’est pas uniquement réservée aux franchises de marchés modestes. En fait, la moitié de cet argent va d'abord financer la compensation des joueurs selon les accords du plan d'avantages sociaux des joueurs de la MLB. Pourquoi la MLB utiliserait-elle des dollars d'un fonds d'équilibre compétitif pour payer les avantages sociaux des joueurs ?

À la lumière de ces faiblesses flagrantes de la CBT, la solution me semble évidente. Le « Salaire assujetti à la taxe de luxe » doit être éliminé, et la véritable AAV (Valeur annuelle moyenne) du contrat de chaque joueur devrait être le seul chiffre utilisé pour calculer la masse salariale « CBT » d'une équipe.

Pour renforcer encore davantage le système de redistribution des avoirs, je suggérerais même de supprimer la taxe progressive de 30-40-50 % pour les années consécutives de dépassement et de la régler à un taux fixe de 40 % chaque année où une équipe dépasse le seuil.

De plus, 100 % de l'argent amassé via la taxe devrait être utilisé pour compenser les équipes à petit marché, qui devraient à leur tour se voir attribuer un seuil-plancher de dépenses en fonction du montant reçu. Parce qu’il faut aussi mentionner que l'inégalité est partiellement due à l’avarice de certains propriétaires parmi les moins fortunés. La MLB peut facilement trouver une autre source de revenus pour financer le programme d'avantages sociaux des joueurs.

Une ligue sportive professionnelle n'est aussi forte que son maillon le plus faible. Les franchises en difficulté, au guichet et au classement, nuisent à l'intégrité compétitive du sport. Éventuellement, à mesure que l'écart augmente et que l'intérêt des fans diminue, cela ne peut avoir que des effets négatifs sur le bénéfice net de chaque propriétaire.

Tous (sauf membres de la Dodger Nation) ont pu s’imaginer le roulement des yeux collectif quand Ohtani et Yamamoto ont tous deux signé pour jouer à LA-LA Land, surtout dans des endroits comme Pittsburgh, Kansas City, Tampa Bay, Milwaukee et d'autres marchés qui savent que leur équipe ne pourrait jamais espérer réaliser un tel coup.

Les propriétaires et les joueurs ont tous deux une soif insatiable d'argent et de victoires, ce qui tend toujours à jouer en faveur des grands marchés de la MLB, sans oublier l'attrait géographique qu’offrent certaines de ces villes. Même si des franchises comme les Rays de Tampa Bay, les Brewers de Milwaukee et les Guardians de Cleveland ont prouvé qu'il était possible de connaître du succès sans dépenser en fou pour la masse salariale, des études récentes ont révélé une corrélation claire entre le montant dépensé pour le personnel joueur et les victoires au baseball.

Les hommes d'affaires avisés réalisent que d’accepter une perte de marges bénéficiaires à court terme due à une frénésie de dépenses est un modèle d'affaire durable dans le sport professionnel, car une longue série victorieuse avec des joueurs vedettes apporte à la franchise le prestige qui contribue à augmenter sa valeur marchande.

Cependant, la direction de la MLB doit maintenant réaliser qu'un équilibre compétitif sain est crucial pour la santé à long terme de leur sport et utiliser tous les outils à leur disposition pour en assurer l'intégrité. En refusant de maximiser l’efficience de la CBT, elle envoie le mauvais message à une grande partie de leur public cible.

Malheureusement, suite aux événements de cette saison morte, je suis convaincu que le message a maintenant bel et bien été reçu. Les propriétaires et les joueurs doivent tous en venir à un compromis et inverser le déséquilibre concurrentiel lors de la prochaine CBA, au risque de voir les fans perdre de l'intérêt, la MLB perdre des franchises et les joueurs perdre des emplois.

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